Histoire du couteau Nontron
Le Nontron porte le nom du village qui l’a vu naître. Son histoire est si longue qu’il en est même difficile de dater sa naissance. Cependant les spécialistes sont d’accord sur le fait que ce couteau du Périgord est le plus vieux couteau de France. Guillaume de la Villeneuve faisait déjà allusion aux «couteaux de Pierregord» dans sa «Nomenclature des crieries de Paris », au début du XIIIème siècle ; il est donc possible que cette région du sud-ouest produisit des couteaux et autres outils tranchants bien avant le bas Moyen-âge.
Tous les ingrédients étaient en effet réunis : le minerai de fer (nontronite), présent sur place et depuis fort longtemps exploité par le peuple gaulois des Petrocorii (forges d’Azat-en-Nontronnais, entre autres) ainsi que les massifs de buis, pour la matière première, et les eaux pures très froides du Bandiat, en contrebas du village, pour la trempe des lames. L’historien et géographe grec Strabon d’Amasée, contemporain de Jules César et grand voyageur, décrit les Pétrocores comme d’excellents travailleurs du fer.
Vers 1300, le glossaire de Saint-Palaye rapporte les écrits des poètes qui rendaient hommage à ces outils tranchants. Les compagnons couteliers parisiens prirent l’habitude de passer par Nontron pendant leur tour de France. C’est cette réputation d’excellence dans le travail du métal qui explique pourquoi le roi de France Charles VII « le victorieux » (mis sur le trône par Jeanne d’Arc) aurait commandé son épée à Nontron.
Le 13 octobre 1653, Guillaume Legrand, maître coutelier de la paroisse Saint- Eustache à Paris épouse Marie Belleterie de Nontron et s’installe dans la ville de son épouse pour y fabriquer le couteau éponyme. C’est seulement quelques décennies plus tard que les premiers Nontron se seraient parés d’une virole tournante.
En 1788, la région Périgord compte trente-cinq coutelleries, selon l’inspecteur des Manufactures et Fabriques de la Généralité de Bordeaux. La ville de Nontron, avec seulement 2800 âmes, emploie alors huit ouvriers couteliers dans cinq coutelleries qui jouissent d’une excellente réputation.
Deux familles - qui marqueront l’histoire du Nontron plus d’un siècle durant - font leur entrée à la fin du 18ème siècle: les Bernard et les Petit. Lors du premier conflit mondial, les ouvriers des coutelleries Petit et Bernard se consacreront, sur demande du Ministère de la Guerre, à la fabrication de Nontron à cran d’arrêt. Dix ans après la fin de la Grande Guerre, ne subsiste plus que la Coutellerie Petit.
La « Coutellerie Nontronnaise » a été créée en 1928. Alphonse Chaperon, garagiste à Nontron, s’en porte acquéreur en 1931. Son fils Gérard tiendra les rênes de la Coutellerie artisanale de Nontron de 1943 à 1986, année de son rachat par la SARL Bernard Faye qui la vendra à son tour à la SARL Forge de Laguiole en 1992. La Forge de Laguiole aura à cœur de préserver ce savoir-faire coutelier sur son territoire. Dans son nouvel écrin de bois et d’aluminium signé Luc-Arsène Henry depuis le 21 juin 2000, le coutelier d'art s’est offert les services de designers internationalement reconnus afin d’aborder le troisième millénaire avec la farouche volonté de faire savoir que le plus vieux couteau français est dans la force de l’âge.
L'entreprise artisanale compte actuellement une vingtaine de couteliers et est labellisée Entreprise du Patrimoine Vivant.
Légendes
La pyrogravure: Ces motifs, dont on ignore toujours l’origine et la signification, se composent de «mouches» : sortes de V inversés encadrés de 3 points et de rangées de petits points. Symboles religieux ? Référence aux compas des Compagnons du Devoir ? Cela fait plus d’un siècle que ces mouches font parler d’elles. Apparues en même temps que la forme « sabot » du manche, elles décorent aujourd’hui l’ensemble des modèles Nontron en buis, de poche comme d’office et de table.